70 personnes réunies à Lyon pour écouter Alix de Bonnières, chef de service en soins palliatifs.
Médecin du travail avant d’intégrer les Soins Palliatifs, le Docteur A. de Bonnières s’interroge sur ce que la future loi sur la fin de vie changera dans la pratique des soignants.
Elle rappelle que les Soins Palliatifs sont ouverts aux personnes en fin de vie, à celles qui souffrent de maladies dégénératives ou pour permettre aux accompagnants à domicile d’avoir un peu de répit. Les Soins Palliatifs prennent en charge la souffrance physique, psychologique et spirituelle. Dans ces services on ne prolonge pas artificiellement la vie (pas de chimio, de dialyse, de réanimation, de soins lourds) mais on ne l’abrège pas non plus. Les équipes soignantes ne sont pas intrusives et ne forcent pas les malades à avouer ce dont ils souffrent. Elles acceptent le non-dit, voire le déni. Elles sont attentives à la souffrance de l’entourage des personnes admises dans le service. Les Soins Palliatifs sont bien dotés mais il n’y en a pas assez.
La notion d’aide active à mourir se décline soit en euthanasie soit en suicide assisté. L’euthanasie est pratiquée par l’équipe médicale qui injecte au patient une substance létale(ex. la Belgique) tandis que lors du suicide assisté le malade déclenche lui-même l’injection pour se donner la mort (ex. la Suisse). En France, la loi Claeys-Leonetti de 2016 autorise la sédation profonde et continue maintenue jusqu’au décès et interdit « l’obstination déraisonnable ». Cette sédation plonge le malade dans un coma artificiel qui inhibe la douleur. Tout malade dont le pronostic vital est engagé à court terme, celui dont la douleur est réfractaire aux antalgiques habituels, celui qui a du mal à respirer, bénéficient de cette sédation. La notion d’intention est importante : on veut soulager la douleur physique et la souffrance morale (la peur de la mort, l’impression d’être abandonné…) on ne veut pas « tuer ». La demande d’euthanasie émane parfois de la famille qui n’en « peut plus de voir souffrir » la personne aimée.
La future loi sur l’aide active à mourir doit s’accompagner du développement des soins palliatifs, intégrer l’autonomie du patient (importance des directives anticipées qui expriment la volonté du malade et qui doivent être respectées, écoute de la personne de confiance) et ne peut s’appliquer aux mineurs.
Cette loi fera changer le regard sur la vulnérabilité et transgressera un tabou : « tu ne tueras pas ». Cette transgression s’estompera en se banalisant. L’aide active à mourir sera soumise à une décision collégiale mais elle interroge la fonction des soignants : soigner ou donner la mort ? Entre alors en jeu la clause de conscience : je refuse de donner la mort. On peut alors redouter le départ de médecins ou d’infirmières alors qu’il en manque déjà beaucoup. Les bénévoles d’accompagnement sont indispensables car les malades leur confient ce qu’ils ne peuvent dire à la famille ou à l’équipe médicale. Dans les derniers jours de la vie, il est capital de pouvoir avouer ses angoisses, de faire le bilan de sa vie, « d’apurer les comptes », donner et/ ou recevoir le pardon, se réconcilier avec les siens pour « partir en paix ».
Les Soins Palliatifs restent le lieu privilégié pour « une fin de vie apaisée » .